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samedi 15 septembre 2012

Vertiges

"Une pierre décrochée siffla dans le silence cristallin. "C’est la mort qui passe", se dit-il. Et les mots jaillirent, toujours là pour le soutenir ! "Je vivrai pour un but précis et j’obligerai ma volonté à lutter sans cesse contre le Temps qui passe. Je serai plus heureux en ne parvenant pas au but que de ne pas en avoir eu. Car le Temps que j’aurai passé à lutter sera du Temps que j’aurai possédé." Il n’avait jamais écrit par plaisir. Les mots venaient en lui. Ils étaient le catalyseur nécessaire pour le ranimer quand il s’enfonçait dans la boue des vallée." Extrait du livre


Deux hommes…

Ils sont deux, Max et Jonathan, adeptes des montagnes. Tous deux subjugués par les beautés que seules leurs hauteurs dévoilent, les mystères qu’elles exposent. Pour eux "la montagne est une magicienne […] On la regarde et puis on oublie tout." Tout est dit en si peu de mots pour comprendre leur passion.

Max est le premier de cordée et pour lui "seul l’effort pouvait atténuer les brûlures qui le dévoraient". Jonathan savait cela, il le suivait en respectant son silence car il n’oubliait pas non plus que "Max ne parlait pas pour rien".

Cette montagne, Max n’ignorait pas son existence, il connaissait le coût que pouvait représenter l’amour qu’on peut lui porter, des guides "avaient redescendu les corps de Barthélémy et de son frère". Il avait appris les dangers, nombreux, qu’elle cache sous les beautés qu’elle nous montre.

C’est ainsi que les deux hommes entament leur ascension, Max en tête, c’est immuable entre eux : "Sans le quitter des yeux, Jonathan laissa filer la corde. Désormais ils seraient unis par ces deux brins colorés et sans cesse, grâce à eux, ils s’éloigneraient et se retrouveraient".

Leur évolution est bonne et elle se déroule bien mais avec la montagne rien n’est jamais acquis. Tout va bien, Max est en tête, Jonathan suit quand c’est à son tour de grimper.

Une montagne…

Une frayeur, puis deux, vont quelque peu éreinter Jonathan. Cependant, la montagne qui sait être une belle amie peut se révéler être notre pire ennemie lorsque l’on ne s’y attend pas. Elle va secouer les deux hommes au moment où "une vague de rochers s’abat sur eux".

Max est blessé, inconscient. Jonathan encaisse la peur, "il pense que ça ne s’arrêtera plus, qu’il est condamné à tout jamais, tant que son cœur n’implose pas sous les coups répétés de la peur".

Malgré les accidents constatés, Max "n’aimait pas qu’on traite la montagne de meurtrière. C’est l’homme qui décidait de s’y perdre et de chercher". Alors, lorsqu’elle étale ses beautés, l’homme répond à cet appel en souhaitant les découvrir de plus près, parfois trop près.

Même pour un alpiniste aguerri, rien n’empêche la montagne d’agir selon ses lois et lorsque le mauvais temps décide de s’associer à elle, la vie n’est plus qu’un mince fil auquel nous sommes suspendus. Et pour ces deux hommes là, "le plaisir s’imposait au-delà de la raison et de ses sempiternelles mises en garde. […] Ils vivaient en quête d’un absolu au-delà de l’oubli des hommes, qui est plus terrible que la mort".

Parce que c’est bien cela qu’allaient chercher ces hommes sur des sommets toujours plus hauts, l’oubli de la vie d’en bas, celle des autres parmi lesquelles ils ne se sentaient pas vivre.

Pour la vie…

La chute des rochers ne les a pas épargnés. Max reste inconscient, Jonathan décide de continuer l’ascension non sans questionnement, non pas seul non plus, mais avec Max sur son dos. A quel moment la folie nous gagne ? A quel moment, nous permet-elle d’accéder à de tels dépassements de soi ?

Jonathan n’abandonnera pas, il veut aller jusqu’au bout de ce pour quoi ils ont entamé cette ascension, et pour cela, tout en lui va se décupler, mais la raison… elle…

Pour Jonathan, à cet instant que nous n’imaginons pas traverser nous-mêmes, "il s’agissait de recentrer les forces de l’individu dans des luttes qui lui appartenaient. C’était une histoire simple. La simplicité qu’il n’avait jamais rencontrée dans le monde des hommes".

Au prix d’efforts surhumain, mais également "inhumain", Jonathan va parvenir au sommet pour ensuite entamer la descente sur un autre versant. Toute réalité semble l’avoir quitté, cependant, ce n’est plus cela qui compte à présent. Au plus profond de lui, "l’instinct de survie interdit au cerveau toute intrusion. Les pensées sont annihilées. Le geste parfait a établi son règne. […] On ne devient pas soi sans sacrifice".

Thierry LEDRU nous offre, là, un concert d’émotions en tout genre mais pas que… Il nous invite maintes fois à la réflexion par une succession de petites phrases de poids. Dans ce roman où parfois on a l’impression que la raison s’échappe, la nôtre prend corps inévitablement.

Voici donc un bel ouvrage qui vous fera frissonner, rêver, sourire parfois, réfléchir aussi.

À acquérir sans aucune hésitation !

Marie BARRILLON


Informations sur le livre :
Titre : Vertiges
Auteur : Thierry LEDRU
ISBN : 9782842062248
Format broché d'occasion : 12,66 €
 

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