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mardi 15 juin 2010

Polyarthrite d’un ange

"Durant ces deux premières années, je vivais normalement, j’avais des parents heureux, un grand frère gentil, une belle petite famille sans problème. Pas de quoi écrire un livre ! Aussi étrange soit-il, j’aime ne pas pouvoir me souvenir de cette période, car je n’avais pas encore mal. J’accepterais beaucoup moins bien la douleur si je savais ce que c’est de vivre sans elle. Pendant deux ans, elle fut une bonne locataire. Très discrète, je la remarquais à peine. Très polie, elle ne manquait jamais une occasion de me saluer et bien entendu, elle payait toujours le loyer à la date convenue."
Extrait du livre

POLYARTHRITE, PLUS QU’UNE MALADIE…

Nous nous demandons souvent, face à certaines maladies, comment les parents font pour surmonter la situation et tenir le coup. Mais, nous nous interrogeons bien moins souvent sur le comment les enfants vivent eux-même leur maladie. Comment ils l’assument. Ils en font leur combat quotidiennement de manière étonnante. Non par choix, mais par pure obligation et bien souvent sans rechigner.

C’est ce que nous raconte ici Emilie Michel, de manière spontanée,  sans prendre de gants. Mais avant cela, nous découvrons deux préfaces. La première faite par les parents d’Emilie. Ces parents qui ont vécus ce parcours difficile de leur fille et bien évidemment, avec elle. Ne sont-ils pas les mieux placés pour en parler ? Bien sur que si !

La seconde préface est écrite par Elise Chassang. Cette dernière est, comme Emilie atteinte de polyarthrite. Cette maladie est donc également son combat. Un point commun qui les unies bien qu’elles ne se connaissent pas : "Je ne connais pas personnellement Emilie, mais à travers son histoire, ma vie semble défiler devant mes yeux et je me reconnais en elle. C’est pour ce passé commun qu’Emilie a souhaité que je lui préface son livre."

Et d’ajouter, pour que nous comprenions bien ce lien qui les uni : "Nous avons la même maladie et même si la forme n’est pas commune, les blessures sont similaires qu’elles soient morales ou physique."

QUAND L’EVIDENCE EST INELUCTABLE…

Les premières inquiétudes, pour les parents d’Emilie, surviennent alors que leur fille n’a que deux ans. Pour la maman, soudain, plus rien ne semble exister. L’état de santé d’Emilie voile son ciel, "le temps s’était arrêté, comme suspendu aux lèvres d’un médecin". Lorsque le diagnostique tombe c’est l’évidence qui l’accompagne. Toute la vie de la famille va en être bouleversée, à commencer par celle de la petite. Les douleurs vont être coutumières.

Il lui faudra vivre avec parce que le choix ne s’offre pas à elle. Se battre chaque jour ou abandonner ! Voilà son seul choix ! Mais lorsqu’un enfant se retrouve si jeune confronté à la maladie, il n’y a qu’une chose qui en ressort de manière instinctive, sans aucune préméditation, c’est l’instinct de survie. Ensuite, au fur et à mesure, c’est la force de se battre envers et contre tout qui s’associe à cet instinct de survie : "La maladie nous endurcit, elle nous oblige à repousser notre seuil de tolérance de la douleur, car plus on en supporte, plus elle devient supportable".

La vie continue son chemin, d’examens en examens, de prise de sang en souffrance, jusqu’à ne plus pouvoir simplement marcher. Le petit "Ange" est torturé sans que les médecins parviennent à la soulager.

TOUT REFAIRE ENCORE ET ENCORE !

Puis le papa, militaire, est muté pour être instructeur dans une petite ville du Massif Central. Toute la famille suit le mouvement. De nouveaux médecins et tout le parcours déjà fait est à refaire. Tout est à expliquer de nouveau. Mais, les médecins, peut-être septiques, demandent à refaire tous les examens déjà pratiqués. Il y a de quoi se mettre à douter quand même les médecins doutent des examens précédents réalisés par leurs confrères. A cette époque, "le petit ange" n’a pas encore six ans et déjà tellement secoué, perturbé, charcuté, torturé dans sa chair d’une part, puis dans son âme d’enfant plein d’innocence.

Le destin ne s’arrête pas là. Il va continuer à chahuter Emilie et sa famille. Vivre avec la maladie de l’intérieur, le papa va également l’apprendre. Et les souffrances au quotidien vont durer encore et encore.

Comment parvenir à appréhender la vie, lorsqu’elle vous empoisonne autant, si tôt, et que rien ne s’arrête ? Une belle leçon de force humaine montrée par une enfant dont bien des adultes n’en ont pas une once.

SOLIDARITE FAMILIALE…

Le grand frère, de deux ans plus âgé, est très proche de la petite Emilie. Comment ne pourrait-on pas l’être : "Je lui racontais mes exploits en peinture et il faisait semblant de s’y intéresser." Ce qui montre bien la proximité de ces deux enfants et l’attention de l’un envers sa petite sœur malade. La maladie avait décidée d’être plus forte et le petit ange malgré sa force perdait son énergie à grande vitesse.

A l’âge de sept ans, une mauvaise nuit la vida complètement, pas seulement physiquement : "J’étais allongée dans les bras de maman et petit à petit je ne lui serrais plus la main non plus. […] Elle me sentait partir et elle ne savait pas où j’allais. Je n’étais plus blanche, j’étais transparente."

Les traitements ont leurs efficacités mais aussi leurs inconvénients. Souvent, ils vous soignent d’un mal d’un côté et vous abîment de l’autre. C’est ce qui se produit pour Emilie, en l’occurrence pour ses yeux. Les collyres qui étaient supposés soigner son uvéite ne la soignaient pas vraiment d’une part mais qui plus est venait "provoquer un début de cataracte de l’œil gauche". Impossible de se débarrasser du mal sans en provoquer un autre.

Au fil de toutes ses douleurs, Emilie n’accepte pas de voir sa maman souffrir et en arrive à culpabiliser. Elle grandit et de se fait, prend conscience des ravages de la maladie autour d’elle : "Maman était là, livide, elle m’avait entendu gémir et à la voir je m’en voulais un peu d’avoir tant voulu qu’elle m’entende. […] Je pense que c’est à cet instant que je compris qu’en plus d’être dure, il fallait que je le sois en silence."

Chose évidente et logique, la petite grandissant prenait conscience, outre des ravages de la maladie, de sa différence par rapport aux autres, ne comprenant pas pourquoi, elle, devait subir chaque jour et pas les autres : "J’avais le sentiment d’avoir été piégée, roulée dans la farine, arnaquée. Alors, ils avaient le choix eux ! Ils n’avaient pas mal. Alors pourquoi moi et pas eux ? Qu’avais-je fait de mal, de mauvais, pourquoi avais-je été punie dès le début…"

LE CHEMIN DES INTERROGATIONS…

Les grandes questions commençaient à affluer mais il n’y avait pas de réponses. La vie est parfois si injuste et cette injustice n’est pas toujours réparable. En tout cas, aucunement explicable. Le regard des autres prend également une place importante et désagréable. La maladie d’Emilie prend toute la place en définitive. Intérieur mais aussi extérieur. Rien ne l’apaise, pas même les nouveaux traitements : "Ma vie devenait lourde à gérer et j’avais l’impression d’alourdir celle des gens que j’aimais […] Je voulais contrôler la maladie, ne pas la laisser prendre toute ma vie, mais elle gagnait du terrain et je ne pouvait rien pour la stopper."

La plus belle victoire de cette enfant, devenue grande bien sur, outre son combat quotidien contre la maladie était de faire sourire sa mère.

Finalement, rien n’épargne la petite. Tout bascule pour se remettre en place, puis bascule à nouveau. Le combat ne s’arrête pas seulement à celui de la maladie, on s’en aperçoit constamment au fil des pages.

Nous prenons là, une grande leçon dans ce témoignage surtout lorsqu’on réalise qu’on ose se plaindre de nos petits bobos quotidiens qui ne sont rien finalement, alors que d’autres en vivent de gros, très gros, que nous ne serions peut-être même pas apte à supporter. Certains perdent les pédalent alors qu’ils ont tout, y compris la bonne santé or que d’autres tiennent la barre de leur vie très haut pour parvenir à tenir debout et tentent malgré leurs souffrances à maintenir un moral d’acier, avec des hauts et des bas, certes, mais tout de même ! Prenons-en note ! Retenons la leçon ! Ce ne sera que bénéfique.

Un témoignage fort, qui donne à réfléchir.
Un prix qui n’est pas excessif pour cet ouvrage de bonne qualité dans son ensemble

Marie BARRILLON

Informations sur le livre :

Titre : Polyarthrite d’un ange
Auteur : Emilie Michel
Editions : Praelego
ISBN 13 : 9782813100030
Prix : 15,00 euros



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