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mardi 17 novembre 2009

Kartouch

« Soudain les choses étaient claires en lui : il était parti pour réaliser un fantasme de totale irresponsabilité. D’autres pistes avaient été envisagées, qui répondaient chacune à ce même fantasme : pensionnaire de luxe d’un établissement psychiatrique, malade – accessoirement imaginaire – confié aux soins et aux mains expertes d’infirmières, d’assitantes sociales, de nounous. Tout cela criait le même désir suprême : celui de ne devoir plus rien à personne. Celui d’être - enfin ! – pris en charge. »
Extrait du livre

ROBERT DUBOIS…


Robert Dubois est originaire de Bruxelles dont il aime les battements. Son travail n’est pas des plus enthousiasmants, « il n’avait jamais redressé que des impôts. » Sa jeunesse n’avait été guère passionnante et « son adolescent avait fini par s’essouffler. »

Aujourd’hui, il évoluait dans un grand bureau contenant de beaux meubles. Sa vie sociale n’a rien de sociale, disons qu’elle est même assez pauvre, uniquement dotée de « quelques rituels automatiques de mâchoires et de poignées de mains. » Quant à sa vie affective, elle ne s’en porte pas autrement. Il vit dans un « duplex », entendons par là : rez-de-chaussée et cave.
Cette cave, il l’a aménagée de façon sporadique mais pouvant lui permettre d’y écouter un disque sans être entendu. Ce disque, toujours le même, il l’écoute inlassablement lorsque la nuit ne lui accorde pas le sommeil escompté.

Robert Dubois, en réalité, est dépressif. Sa secrétaire l’a surpris à plusieurs reprises en pleine sieste dans son bureau alors que tout le monde est absorbé dans son travail. Cette sieste ne dure jamais très longtemps, quelque cinquante-cinq minutes chaque après-midi, mais la secrétaire n’a pas pu tenir sa langue et l’information a bien fini par faire le tour de tous les bureaux. C’est ainsi qu’il se retrouve affublé du ridicule surnom de « Mr cinquante-cinq minutes » faisant de ce fait honneur à son rang. Mais, Robert Dubois « était allongé dans son bureau comme il était couché dans sa vie », ce qui en disait long sur l’état d’esprit de cet homme, somme toute plus très jeune mais pas encore vieux.
Sa vie amoureuse désertique n’arrange rien, et surtout pas son état mental.

CHANGEMENT DE VIE…


Il en était ainsi de Robert Dubois jusqu’à un matin d’avril où pour lui tout bascule : « Robert Dubois ne se rendrait pas au travail. Ni ce matin-là, ni les matins suivants. A défaut de se suicider, Robert Dubois prit la résolution, ferme et irrévocable, d’aller s’enterrer là-bas, […] vers le lointain Orient. […] Le voyage pouvait commencer. »

Et voilà notre Robert Dubois parti dans une épopée bien étonnante. Le trajet en train, une immense carcasse, s’avère être long et pour le moins fastidieux. Visiblement, il ne souhaite converser avec personne, faisant même croire qu’il est muet en mimant une « gesticulation faciale tout à fait ridicule », restant ainsi en « huit clos » entre lui et lui. Il était, depuis son départ,  dans la tentative de rédaction de poèmes qu’il avait opté de noter sur un carnet. Par deux fois déjà il en avait changé le titre, toujours rattrapé par l’indécision, passant de « Carnets d’un mort-vivant » en « Petite diversion des larmes. » Rien de bien gai.

C’est dans ces conditions de voyage hors du commun que Robert Dubois fait la rencontre de Kartouch. Une rencontre surprenante sans pour autant être des plus agréables au premier abord. Cet homme ressemblait à un fantôme déplaisant et « venait de prendre le contrôle de la vie de Robert Dubois. »

Décidément, rien n’allait plus dans ce voyage, Robert avait été pillé, dépossédé de tout ce qu’il avait. Ne lui restait que son pantalon, sa chemise et ses bottes…et son carnet de poésies, qui visiblement n’intéressait personne. Et ce Kartouch était toujours là !

DES RENCONTRES ETRANGES…


Une panne de train et Robert avait suivi Kartouch, malgré son air hors du commun, dans une « lente pérégrination, au hasard des rivières de fortune, des arbres désolés, parfois même des auberges. Les visages croisés en cette Sibérie orientale étaient aussi rares qu’étrangement divers. »  Au fil des jours, robert Dubois devenait même presque le valet de ce Kartouch. Ce dernier était un drôle d’énergumène qui se vantait de choses qu’il n’avait jamais faites mais se sentait ainsi en position de supériorité. Pour sa part, Robert Dubois restait confiné dans son mutisme afin de ne surtout pas dévoiler qu’il n’était pas muet en réalité.

De surprenantes épopées en étranges rencontres, pour Robert Dubois qui avait souhaité changer de vie pour se perdre, loin, ailleurs, c’était chose tout à fait réussi. Plié aux quatre volontés de Kartouch, il n’osait pas rechigner et encore moins se rebiffer. Encore aurait-il fallut qu’il en ait le courage mais cet état de volonté lui était impossible, voire même inconnu, pleurant parfois comme un enfant devant cet ogre immense et costaud.

Mais alors qu’il fait la connaissance d’Igor, celui-ci lui révèle les élucubrations dont Kartouch se croit originaire, créant ainsi une zizanie supplémentaire dans l’esprit de Robert Dubois, mais le confortant dans l’idée première qu’il avait du colosse comme étant « bel et bien perdu pour la raison […] Kartouch est un météore sauvage qui ne se résume pas à une énigme. »

D’étranges unions en multiples larcins, menus ou non, les trois compères battaient le sol de cette Sibérie orientale. Les choses ne s’en arrêtent pas là. D’autres rencontres, d’autres péripéties rocambolesques emporteront Robert Dubois au fil des pages. Mais, où tout cela va-t-il le mener ?

Quelques jolies phrases, en passant, pour votre plaisir :


« La respiration de sa vie ne tenait plus qu’à un fil. »

« Il y a des moments, dans l’existence, où ce que nous serions à jeun tentés de considérer comme futile et sans enjeu aucun paraît tout à coup essentiel, décisif. »
« Un tigre n’est jamais aussi grand et puissant que quand il est là, face à vous, et qu’il toise votre maigreur. »

« Il ne suffit pas de fuir ses démons pour considérer qu’ils sont définitivement terrassés. »

« Ma poésie, c’est juste d’autres mots pour enjoliver le constat de mon inexistence. En vérité, je suis une toute petite chose. »

« Tu passe ton temps à fuir, à te dissimuler et à trahir mais tu ne trompes jamais que toi-même. »

Marie BARRILLON

Informations sur le livre :

Titre : Kartouch
Auteur : Nicolas Crousse
Editions : Le Somnambule Equivoque
Collection : Fulgurance
ISBN 13 : 9782930377100
Prix : 13,00 €


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