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jeudi 16 juillet 2009

Bonjour ma douce vie

« Depuis que je suis chauve, le masque de la maladie est sur moi, je suis devenue une révélatrice des peurs humaines, celle qui porte la poisse, celle qui est contagieuse, celle qui n’a pas d’avenir. Où sont passés les gens du quartier qui me saluaient autrefois ? Je suis transparente, je suis un monstre. Est-ce la pudeur, la peur d’être maladroit de ne pas savoir quoi me dire ? Je ne suis pas blessée, je les comprends, je ne ressens rien, je constate simplement que ma vie devient moins riche humainement mais que je gagne en lucidité sur les comportements sociaux. »
Extrait du livre

GENTILLE LEUCÉMIE ?


Sibylle a tout pour être heureuse. Elle est belle. Un homme avec lequel elle partage un véritable amour. Du moins c’est ce qu’elle croit. Elle est actrice et rien ne lui permet de présager des jours sombres… pourtant.

Sa vie est presque une réussite. Presque, parce que souvent un point noir vient obscurcir le joli tableau. Un grain de poussière vient salir les belles couleurs de notre joli paysage pour finalement le couvrir d’une nappe opaque.

Sibylle apprend qu’elle est atteinte d’un cancer, comme ça, un jour pas comme les autres. Généralement, c’est toujours un jour où tout va bien où le bonheur est en terrain conquis, où on regarde les êtres avec tendresse et les alentours avec plaisir.
Généralement, c’est un jour où la caresse du soleil nous fait tout aimer. Et c’est à ce moment précis que le bonheur décide d’aller faire un tour ailleurs en vous oubliant derrière lui.

Sibylle prend cette annonce de plein fouet : « Tu as la maladie d’Hodgkin, maladie du sang, dans le jargon de la médecine, c’est une gentille Leucémie. »  Mais, y a-t-il vraiment de gentilles Leucémies ? Impossible d’imaginer qu’une maladie puisse être gentille, et encore moins un cancer.

MERCI BEATRICE...


Sibylle se raccroche au rôle qu’elle doit retenir, celui de Béatrice dans « Beaucoup de bruit pour rien » de Shakespeare. Une comédie datant de 1598 mais dont la première publication remonterait à 1600. Cette comédie fut jouée à la cour lors des festivités pour le mariage de la princesse Elizabeth avec Frédéric V. Cette comédie reste l’une des comédies de Shakespeare les plus populaires.

Ce livre va la suivre partout mais surtout dans les couloirs de l’hôpital. Elle le gardera contre elle pendant les séances de chimiothérapie durant lesquelles elle fera de Béatrice une invasion en elle, pour tenir, pour ne pas ressentir ce qu’on lui fait.
Dans ces moments, elle n’est plus Sibylle, elle est Béatrice : « Mon cœur est si bien employé à vous aimer qu’il ne m’en reste pas pour protester. »

Mais la maladie détruit. La maladie dévore tout, et pas seulement le corps qu’elle envahit. Elle anéantit aussi trop souvent ce qui se trouve à l’extérieur, tout autour. Elle balaie l’amour. Comme si la maladie ne suffisait pas à blesser les êtres qu’elle investit, elle leur enlève aussi cette part de sentiment tellement indispensable.

Jean-Charles, l’homme qu’elle aime se détache puis s’en va. La laissant à ses douleurs, ses frayeurs, son malheur. Mais, Sibylle se bat, même dans les pires moments. Le combat devient sa raison d’être aux côtés de Béatrice dont elle ne se sépare plus. Le combat comme une ultime force qu’elle réclame à son corps et elle endure tous les sévices de la maladie : « toute la nuit je vomis une bave verte et amère, au rythme des spasmes. Je vide mon vide : la fatigue, les piqûres, la défonce chimique, le nucléaire, l’angoisse, la vie, la mort. »

LA VICTOIRE EST-ELLE AU BOUT DU CHEMIN ?


Sibylle va au bout de ses forces, au bout d’elle-même, au bout de sa résistance qu’elle n’imaginait pas si grande. Ses amis sont là, l’entourent alors que la boulangère n’ose même plus lui déposer sa monnaie dans la main ou le facteur qui désormais se sauve la tête dans le guidon de son vélo sans plus lever son regard vers elle.

Elle encaisse les chocs comme une paria face à cette « gentille Leucémie », mais Sibylle se « blinde » de ces comportements extérieurs. Elle se sait « repoussante » dans sa maigreur et sans plus de cheveux. Certes, il y a bien les perruques, mais comme elle le dit : « Moi dans ma vie de comédienne, les perruques me servent à me déguiser, pas à me cacher. » Elle assume.
Son combat, elle le gagnera ! A quel prix ? Mais, elle le gagnera, là est l’important face à ceux qui n’ont pas cette « chance ».

Dans ce livre témoignage, Sibylle Claudel nous pousse sur les traces de sa force intérieure. Elle nous explose au visage son combat difficile. Mais surtout, ce livre remet en place certains dont les comportements sont cruels, indécents, inhumains en nous ouvrant une fenêtre sur le quotidien de ces personnes qui ont surtout besoin qu’on leur tende la main ou tout au moins qu’on les traite normalement. Ils ne demandent rien mais n’ont pas demandé non plus à être investi par la maladie.

Parce que finalement, n’oublions pas que cela n’arrive pas toujours qu’aux autres !


Un format confortable, un témoignage criant, une belle qualité.
La photo de couverture est magnifique.
Une véritable descente aux enfers à lire avec le cœur grand ouvert.
Ce témoignage nous ouvre une porte sur l’invivable chemin que l’auteur a dû parcourir pour revivre tout simplement, et cela donne à réfléchir.

Marie BARRILLON

Informations sur le livre :

Titre : Bonjour ma douce vie
Auteur : Sibylle Claudel
Editions : Grasset et Fasquelle
ISBN 13 : 9782246746317
Prix : 11,90 euros

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