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vendredi 17 avril 2009

La cinquantaine bien tapée

« La perte de mes repères était due à la trop longue fréquentation du même homme, m’habituer à ses tics, à sa mauvaise foi qui me tenait lieu de vérité, à ses faiblesses qu’il maquillait en forces, à son impuissance à me rendre heureuse qui me faisait penser que je n’étais pas capable de l’être, à son rationnement sexuel qui faisait de moi une nymphomane, bref, à sa réalité qui était devenue LA réalité. »
Extrait du livre

REMETTRE SA VIE EN QUESTION... PAS SI SIMPLE...

Dès les premières lignes le ton est donné. Le terme est direct, sans artifice. Le parler est franc, parfois sec, cassant. Rien n’est à cacher, tout reste à dévoiler. L’auteur laisse la plume tracer et retracer une vie sans s’emprunter de pudeur. Parfois crue, elle ne cherche pas à faire d’état d’âme.

A cinquante ans, Caro remet sa vie en question. Son petit équilibre de femme et d’épouse lui pèse, l’oppresse même. Elle veut plaire encore. Pourquoi donc une femme ne plairait plus sous prétexte qu’elle a atteint la cinquantaine « bien tapée » ou non ? « Il était temps à cinquante ans et des poussières de retrouver le fil qui m’a inéluctablement mené de la jeune fille délurée et bien roulée de mes vingt ans à la femme encore désirable mais moins sure de ses charmes vautrée devant son Macintosh. » Contre toute attente, elle se laisse séduire puis emporter dans la frénésie d’une vie à deux cents à l’heure.

De la lassitude d’une vie de couple et de mère bien rangée à la folie sexuelle débordante d’un amant beaucoup plus jeune qu’elle, elle va choisir l’amant.
Lui, c’est Bruno, libre, sans contrainte, et ne cherchant surtout pas à en avoir d’aucune sorte. Caro croit pouvoir jouer sur ce terrain mais c’est sans compter sur les sentiments qui vont prendre naissance en elle, malgré elle.

S’il y a bien une chose que l’on ne maîtrise pas, ce sont les sentiments. Ils apparaissent lorsqu’on s’y attend le moins. Et pour certains, rendant l’autre indispensable.

AIMER : UN BIEN PETIT MOT POUR DE SI GRANDES EMOTIONS...

Mais Bruno n’est pas de ceux qui se laissent capturer, ni même diriger. Il n’est pas non plus de ceux qui s’attachent. Des maîtresses, il en a quelques-unes alors que Caro souhaiterait être la seule ou presque, dans son univers.

Bruno n’accepte pas, lui rafraîchissant la mémoire sans délicatesse : « T’es gonflée de me demander ça alors que t’es mariée ! » Elle tente tout de même de le convaincre tout en sachant que c’est peine perdue : « Oui, mais moi je n’aurais qu’un seul amant tandis que toi tu navigues entre toutes tes femmes. »
L’un comme l’autre n’ont pas vraiment tort dans leur propos. Caro se laisse submerger dans l’attente de cet amant qui n’en fait qu’à sa tête.

L’amour pousse parfois un être dans ses derniers retranchements.

... ET DE SI PROFONDES DOULEURS PARFOIS !

Bruno fait partie de ces hommes beaux que Caro apprécie tant. Elle reconnaît sans faux-semblant que les hommes de sa tranche d’âge n’ont aucune chance d’avoir ses faveurs. Elle avoue sans complexe aucun : « la vue d’une calvitie ou même de quelques cheveux blancs rendait caduque chez moi tout projet de séduction. »

Caro et Gaëlle, son amie d’enfance, échangent leurs expériences, leurs points de vue, leurs idées. Elles sont en partie décalée l’une par rapport à l’autre, peut-être est-ce pour cela qu’elles s’entendent si bien. Et que rien ne les sépare très longtemps. Parfois seulement quelques heures entre deux appels téléphoniques. Chacune son tour remontant le moral de l’autre. Toutes deux sont dans le même dessein : un mari, un amant et viva la vie ! Avec ses avantages et ses inconvénients, ses plaisirs tentateurs et douloureux.

Caro en est là à savoir encore qui elle est sans plus se reconnaître vraiment. Bruno se joue d’elle, ne l’appelle plus. Elle est bouleversée par l’attente douloureuse et interminable, et la peur qu’il l’oublie. Elle ne veut pas être oubliée.

Et puis, il y a la psychanalyste chez qui elle se rend, qui l’écoute plus qu’autre chose mais sans lui apporter de réponse. Parfois cela la met hors d’elle, allant jusqu’à quémander un mot : « jamais de réponse sûre putain de merde et je paie pour ne pas savoir. Si seulement elle pouvait me dire que c’est ça le bonheur, je continuerais sur ce chemin » Malgré tout, lorsqu’elle ressort de consultation, elle ressent un bien être évident. Caro le reconnaît dans sa propre traduction : « Mon analyste révèle la source de mes angoisses, Gaëlle les fait vraiment disparaître, au moins momentanément »

Mais malgré cela, toutes ses questions demeurent. Questions existentielles !

LES QUESTIONS SONT ETERNELLES LORSQU'ELLES N'ONT PAS DE REPONSES !

Dans ce roman, on ne peut que se rendre à l’évidence, après la crise de la quarantaine bien connue, nous découvrons ici une crise de la cinquantaine turbulente. Cette dernière existe belle et bien chez les femmes également et que ce n’est pas un privilège uniquement masculin.

Caro met sa vie sans dessus-dessous sans épargner son mari dans sa tornade. Entre crises existentielles, remise en question et certitudes ébranlées, elle navigue entre son moi intérieur et ses conversations avec sa meilleure amie ou sa psychanalyste, son mari accroché à la bouée de sa vie. « Trente ans à bricoler l’affectif, à penser que l’unique guérison viendrait de maris et d’enfants en oubliant que j’existais encore. »

Comment se sortira-t-elle de cette crise ? Toute la question est là ! Revenir sur ses pas ou continuer sur cette voie où elle s’est engagée menaçant ainsi tout l’équilibre d’une vie bien rangée. La réponse est là, dans « La cinquantaine bien tapée » à lire d’une traite. A lire tel qu’il est écrit sans suffoquer, sans s’essouffler, sans s’offusquer non plus par les mots parfois crus mais en tout cas direct et sans faux-semblant, sans détourner le regard. On n’en attendait pas moins.

En faisant connaissance au fil des pages avec l’héroïne, on la découvre troublante et attachante dans cette perversion que l’esprit met parfois à nous perturber à certains moments fatidiques de nos vies.

A tous ceux qui ont gardé un esprit ouvert et qui ne reculent pas devant la brutalité des mots, des actes parfois aussi et dans la sexualité mise à jour sans artifice.
Texte franc et direct qui ne s’encombre pas de fioritures.

Marie BARRILLON

Informations sur le livre :

Titre : La cinquantaine bien tapée
Auteur : Julie Saltiel
Editions : Editions Denoël
ISBN 13 : 9782207260081
Prix : 15,00 euros



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