"Il ne faut pas croire que la mort d'un enfant handicapé est moins triste. C'est aussi triste que la mort d'un enfant normal. Elle est terrible la mort de celui qui n'a jamais été heureux, celui qui est venu faire un petit tour sur Terre seulement pour souffrir. De celui-là, on a du mal à garder le souvenir d'un sourire." Extrait du livre
Jean-Louis
Fournier nous raconte le parcours avec Mathieu et Thomas, tous deux handicapés
à 80 %. Difficile d'admettre une première naissance lorsque l'enfant est
"différent", alors à la seconde, cela devient très complexe : "Si un enfant qui naît, c'est un
miracle, un enfant handicapé, c'est un miracle à l'envers."
Au fil des
pages, nous nous sentons envahi de compassion, pas seulement pour l'auteur,
mais pour l'ensemble des parents confrontés à ce que la nature leur impose.
Comme le dit si justement l'auteur ici : "Je
ne comprendrais jamais pourquoi ils ont été punis si lourdement. C'est
profondément injuste, ils n'ont rien fait. Ça ressemble à une terrible erreur
judiciaire."
Néanmoins,
à ce "pourquoi", il n'y a malheureusement pas de réponse. La torture
des jours suffit, la culpabilité n'a pas sa place, bien que malgré tout elle
prend de l'espace... involontairement. Personne ne peut savoir à l’avance ce
que la nature va lui imposer de bon comme de désagréable.
L'auteur
tente parfois l'humour pour peut-être dédramatiser, mais cela ne marche pas. Sa
souffrance veut faire sa place dans les mots : "Avec mes enfants, on ne craint jamais de répéter, ils oublient
tout. Avec eux, jamais de lassitude, ni d'habitude, ni d'ennui. Rien ne se démode,
tout est nouveau". Cela dit, une interrogation essentielle reste en
attente de réponse, ce qui dérange sur le cours de la lecture.
Ses "petits oiseaux", comme il les
appelle, il leur a apporté le meilleur, du moins c’est ce que l’on pense au fil
des pages, parce que le contraire aurait été inconcevable, inacceptable. Cependant,
l’interrogation qui nous taraude est toujours présente. Elle concerne la maman
et la sœur qui sont presque totalement évincées du fond comme de la forme, nous
faisant croire que l’auteur seul vit ce drame au quotidien.
Pourtant,
la mère de Mathieu et Thomas ainsi que leur sœur sont présentes et vivent tout
autant la situation au jour le jour, mais à travers les pages, ce qui me laisse
un goût amer c’est que seul le silence leur est accordé, comme si elles n’avaient
pas de mots à poser sur ce vécu, comme si elle n’en avaient pas le droit, comme
si elles n’en avaient cure.
De ce fait, nous sommes entrainés bien malgré nous
sur un faux chemin. L’histoire est véridique, mais il lui manque quelque chose
d’important, à mon sens. Et là s’installe alors le « pourquoi » !
Cet ouvrage,
tel une lettre ouverte, mais totalement personnelle, pour Mathieu et Thomas,
qu'ils n'auraient, de toute façon, pas pu lire témoigne de l'amour que leur
père leur a porté et uniquement celui-là : "Mes
petits oiseaux, vous ne saurez jamais conjuguer à la première personne du
singulier et à l'indicatif du présent le verbe du premier groupe : aimer."
Pourtant,
nous ne savons pas ce que leurs cœurs ressentaient, personne ne le saura
jamais, emportant ce secret avec eux. Cependant, ce que l'on peut imaginer
c'est qu'ils étaient probablement inondés d'amour pour leur père certes, mais
aussi pour leur maman et leur sœur qui faisaient bel et bien partie de leur ciel
quotidien, de leur univers... j'aime à le penser !
Marie BARRILLON
Informations sur le livre :
Titre
: Où
on va, papa ?
Auteur : Jean-Louis Fournier
Édition : Livre
de poche
ISBN : 9782253127840
Format broché : 15,30 €
Format poche : 7,20
€
Suite à la parution de ma chronique, j'ai trouvé cet article sur le web. Il éclaire certains points tout en corroborant finalement ma chronique.
RépondreSupprimerÀ voir ici : http://informations.handicap.fr/art-actualites-1.0.0.0-3101.php