Entretien avec Lisa Giraud Taylor
(Saint-Martial Viveyrols, Edition Pilote 24)
1001 Livres : D’où t’es venu l’idée de ce livre ? Peux-tu l’expliquer aux lecteurs ?
Lisa Giraud Taylor : Ma famille, du côté de mon grand-père maternel, est en majorité originaire de ce petit bout de terre et ce depuis le 16e siècle...
En faisant des recherches généalogiques au sein des différentes Archives Départementales des Régions Aquitaine et Limousin, j'ai découvert quelques vieux documents relatifs à l'église qui m'ont intriqué. En effet, la date de construction de l'église évoquée depuis longtemps était le 13e siècle... Mais ce petit texte latin de 1147 expliquait que l'église représentait déjà un enjeu financier entre deux évêques... J'ai donc décidé de creuser plus profondément avec une supportrice de choc : ma grand-mère adorée qui vivait là-bas depuis plus de 30 ans.
Je pensais au début rédiger un petit fascicule sur l'histoire de l'église-forteresse afin qu'il soit disponible à tous gratuitement. Mais plus je trouvais des informations, plus je me demandais si un livre ne serait pas plus adapté. Et puis, l'amour pour ce village a été le plus fort. Il fallait qu'une trace subsiste au cas où...
1001 Livres : On note une grande recherche pour constituer une fiabilité des informations exposées dans ton livre. On se doute que ça n’a pas du être facile. Peux-tu nous raconter ?
Lisa Giraud Taylor : En effet, ayant un emploi, prenant, à temps plein, je ne pouvais pas y travailler tous les jours. En outre, je vivais à Marseille, bien loin de l'Aquitaine.
J'ai donc fouillé dans certaines Archives Départementales (Dordogne, Haute Vienne, Charente, etc.) pendant mes vacances et ce, uniquement durant 2 ou 3 jours. En sus, le fonctionnement des Archives Départementales me restreignaient à 10 références par jour... Pas facile quand tu as des côtes par dizaine. Un vrai parcours du combattant...
Je dois remercier ici la gentillesse et la compréhension de certains personnels et des lecteurs présents qui m'ont permis de demander plus de documents en prenant sur leurs quotas. Le partage entre "historiens" peut-être.
Je dois remercier ici la gentillesse et la compréhension de certains personnels et des lecteurs présents qui m'ont permis de demander plus de documents en prenant sur leurs quotas. Le partage entre "historiens" peut-être.
Cela m'a pris 5 ans (1 an mis bout à bout) pour rassembler les documents, plans, livres, prendre les photos, rencontrer les propriétaires des demeures nobles, certains particuliers, etc. Et seulement 2 mois de rédaction durant lesquels la maison familiale ressembla à un champ de bataille (en papier).
Je continue mes recherches et trouve de temps à autre des petites choses.
J'ai donc créé un site web pour partager tout cela avec ceux sont intéressés par cette commune et ce canton. (http://www.saintmartialviveyrols.com)
1001 Livres : Quel place tient l’écriture dans ton quotidien ?
Lisa Giraud Taylor : Je dirais "dès que j'ai un moment"...
J'ai une façon personnelle d'écrire. Je crée tout dans ma tête en premier : les personnages, leurs passés, le synopsis, la ligne de conduite, les chapitres, etc. Dès que tout est imbriqué, "monté" comme un film (avec la bande son ad hoc que j'écoute en boucle dans mon mp3), je m'attèle à l'écriture. Au stylo... Il faut que l'histoire glisse jusqu'au 3/4 pour que je me décide à dactylographier le tout. Le dernier 1/3 se fait sur l'ordinateur et c'est souvent à ce moment là où un de mes personnages capte mon histoire et m'amène à modifier ma version initiale....
Donc, je "pense" l'écriture partout : dans le bus, sur un quai, en marchant... J'écris dans ma tête...
1001 Livres : As-tu des “petits trucs” d’auteur qui marquent tes moments d’écriture ?
Lisa Giraud Taylor : Oui... Comme toi, je parie ! C'est assez drôle ce tic chez les auteurs... Même modeste comme moi.
Un de mes trucs est la musique. Chaque roman que j'ai écrit, comme ma monographie, s'est fait en musique. Hormis la bande son, j'ai souvent deux chansons qui accompagnent mon stylo. Cela frôle souvent l'overdose musicale. Je les écoute en boucle. Ce sont souvent des textes qui s'appliquent à mon humeur générale, à l'ambiance du roman, à l'idée que je me fais de la pensée de mon personnage préféré, qui n'est pas forcément le principal.
Alors quand tu restes sur un roman 3 mois, cela devient usant pour l'entourage d'entendre la même rengaine. Et ces chansons restent comme un vieux complice ; Quand tu les écoutes à nouveau quelque temps plus tard, on revit un moment, une émotion et personne ne comprend mais toi, je te sens bien.
Autre "truc" : le thé. Je sélectionne mon thé (avec un nuage de lait of course) et j’y reste fidèle pendant l'écriture.
Sinon, comme je photographie des lieux qui m'inspirent, griffonne un décor, dessine toute la garde robe des personnages, je garde cela étalés devant les yeux. On ne bouge pas de la même façon en jean qu'en robe crayon...
1001 Livres : Dans l’écriture es-tu plan de travail ou au contraire complètement libre ?
Lisa Giraud Taylor : Un peu des deux. Comme je te l'ai exposé ma façon d'écrire est un mélange de "planification mentale" et de liberté laissée aux personnages.
Par contre, je ne fais pas un plan détaillé pour l'histoire. Je suis une ligne de conduite, un fil conducteur mais à chaque fois, la fin n'est pas conforme à mon idée première avec quelque fois une petite déception. Mais ce sont eux, les personnages qui décident au bout du compte de leurs fins et de leurs destins.
De toute façon, cela sera à chaque fois plus sombre que prévu.
Il n'y a qu'un de mes romans que j'ai écrit sans plan, en n'ayant que les noms des personnages, avec juste une chanson en tête (qui n'avait rien à voir avec le thème de l'histoire), en moins d'un mois en bossant deux heures par jour, le soir. J'en suis sortie épuisée, pompée, incapable de penser à une autre histoire pendant des mois. Celui-ci c’est mon bébé.
1001 Livres : Comment est une journée type Lisa Giraud Taylor ?
Lisa Giraud Taylor : Ça dépend de ce que je fais. Si c'est "vie professionnelle", c'est un mélange de routine (comme tout le monde) : bus, boulot, courses, dodo... Rien de véritablement intéressant. De temps en temps (1 fois par semaine en moyenne), je m'évade au cinéma et comme je peux voir 3 films à la suite... Je coupe du monde.
Mais quoiqu'il arrive, 1 heure par jour minimum est consacré à une activité artistique : écriture, mise à jour de mes sites web, dessin, montage de la prochaine session photo (en mode commando si c'est un shooting mode)....le tout avec de la musique. Mais aucune journée ne finit sans la lecture de quelques pages d'un livre (bon ou pas),
1001 Livres : Quels sont tes projets littéraires pour l’avenir ?
Lisa Giraud Taylor : Continuer à écrire. Le fait d'avoir eu un prix récemment pour ma monographie (prix des libraires et éditeurs au concours des clochers d'or-24 2010) m'a permis de me rassurer. Un peu…
J'ai environ 3 livres en attente dans ma tête, mais le manque de temps me contraint de perdre certaines de ces histoires.
Le seul projet que je devrais avoir serait de lancer mes romans dans le grand bain (tout du moins essayer de les présenter aux maisons d'éditions) au lieu de les garder au chaud dans les tiroirs de mon bureau ! Au grand dam de mes proches qui en tant que lecteurs, me conseillent de le faire depuis plus de 20 ans !
1001 Livres : Comment perçois-tu le milieu littéraire en général de nos jours et celui de l’édition en particulier ?
Lisa Giraud Taylor : Ma perception du milieu littéraire est empreinte de respect pour tous ces grands conteurs dont je me sens éloignée. C'est fascinant vu de l'extérieur.
Il semble évident que les rapports entre les lecteurs et les livres ont changé. Et que l'édition est forcée de se renouveler.
Mais le maintien du livre papier est un bonheur. Je m'imagine assez mal lire des centaines de pages sur une tablette numérique quelle qu'elle soit.
En ce qui concerne l'édition pure, je n'ai pas grand chose à exprimer sur le sujet. Mon expérience réduite est positive avec l'éditeur de ma monographie : une belle compréhension et un suivi personnalisé.
Cependant, Il est vrai que ce monde est inaccessible si tu n'as pas de connexion ou la chance d'avoir le coup de pouce d'une bonne fée.
Merci pour cette interview, Marie, et pour toutes ces belles images que tu décris et dont nous profitons chaque jour.
Au plaisir de se rencontrer bientôt.
Propos recueillis par Marie BARRILLON
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